On ne saurait retracer l’histoire du canal du Midi sans parler de Pierre-Paul Riquet. Cet homme d’affaires va consacrer sa vie à la construction du canal entre Toulouse et l’étang de Thau. Redoublant d’ingéniosité, souvent avant-gardiste, Pierre-Paul Riquet mène d’une main de maître ce chantier que l’on compte parmi les plus importants du XVIIe.
Son père, François-Guillaume Riquet est un notaire et un homme d’affaires qui siège au Conseil des Trente de Béziers. L’histoire raconte que ce dernier se serait opposé, en 1618, au projet de creusement d’un canal entre Toulouse et Narbonne…
Que son propre fils soit le constructeur du canal du Midi relève d'une jolie ironie du sort, vous en conviendrez !
Pierre-Paul Riquet épouse Catherine de Milhau et s’installe au pied de la Montagne Noire, dans la ville de Revel. Ensemble, ils ont huit enfants : Jean-Mathias de Riquet (1638-1714), Pierre de Riquet (1641-1641), Élisabeth de Riquet (né en 1645), Pierre-Paul de Riquet (1646-1730), Marie de Riquet (1648-1686), Guillaume de Riquet (né en 1652), Catherine de Riquet (1652-1719), Anne de Riquet (1653-1720).
Le saviez-vous ?
Chaque année, à la Saint-Pierre et la Saint-Paul, la mémoire de Pierre-Paul Riquet est honorée par une messe à la chapelle du Somail.
Pierre-Paul Riquet prospère en tant que fermier dans l’administration des Gabelles, il collecte la gabelle, l’impôt royal sur le sel sous l'Ancien Régime.
Au fil des ans, il gravit les échelons. De regrattier (marchand de sel) au grenier à sel de Mirepoix, il devient receveur (percepteur des recettes) de ce même grenier avant d’être nommé sous-fermier des Gabelles de Mirepoix et de Castres en 1647. En 1661, il devient fermier des Gabelles du Languedoc, une activité très rémunératrice !
S’il n’est pas parti de rien, Pierre-Paul Riquet s’enrichit notablement grâce à sa position. Un métier lucratif mais qui lui confère aussi une place de choix dans la ville de Revel.
Mais Pierre-Paul Riquet nourrit un autre rêve : réaliser un canal de jonction entre l’Atlantique et la Méditerranée.
Ce projet de réaliser un canal entre les deux mers n’est pas nouveau mais les projets antérieurs se heurtent à son alimentation en eau car amener de l’eau au col de Naurouze, point culminant du canal situé à 189 mètres d’altitude, se révèle difficile.
De 1648 à 1660, Riquet et sa famille sont installés à Revel. C’est sans doute à ce moment-là que Riquet explore la Montagne Noire toute proche en compagnie du fils du fontainier de Revel, Thomas de Scorbiac. Ils envisagent alors le rôle majeur que peuvent jouer les petites rivières de la Montagne Noire, massif situé en contrefort du massif central. Tous deux voient un avantage à la Montagne Noire : son relief est moins prononcé que celui des Pyrénées et ses cours d’eau moins denses ! Voilà qui devrait grandement faciliter l’acheminement de l’eau…
Ils envisagent alors de se servir des eaux du Sor, mais le génie ne Riquet ne s’arrête pas là et il soumet une proposition bien plus complète que celle de Scorbiac pour alimenter le canal en eau. En s’inspirant du canal de Briare inauguré en 1642 et grâce à sa connaissance de la Montagne Noire, Pierre-Paul Riquet compte également capter l'eau des rivières du versant méditerranéen de la Montagne Noire et les conduire par une rigole artificielle dans la vallée du Sor, sur le versant océanique, pour les amener jusqu’au seuil de Naurouze, seuil de partage des eaux entre le versant atlantique et le versant méditerranéen.
En 1652, Pierre-Paul Riquet achète la seigneurie de Bonrepos, près de Verfeil au nord-est de Toulouse. Il y fait construire un château de style Louis XIII, à la place de l'ancien fort communal.
C'est dans le parc de son château de Bonrepos qui s'étend sur près de 2 hectares, près de Toulouse, que Riquet met très certainement à l’étude ses projets hydrauliques. De nombreux éléments prêtent à penser qu'il y étudie, en grandeur nature au moyen de bassins installés dans le parc du château, et encore présents aujourd'hui, l’alimentation en eau du futur canal du Midi.
En 1665, Riquet fait réaliser une rigole d’essai pour vaincre toutes les réticences liées à la possibilité d’amener les eaux de l’Alzeau jusqu’à Naurouze. Outre les questions techniques, cet essai permet à Riquet d’imposer sa vision du tracé du canal et de prouver à Colbert que lui seul est capable d’en conduire le chantier.
En novembre 1664, une commission d’enquête est réunie. Elle émet un avis favorable à la réalisation du canal du Midi. L’Édit de construction est signé par Louis XIV le 7 octobre 1666. Cet acte autorise la construction du canal royal du Languedoc (ancien nom du canal du Midi) et Pierre-Paul Riquet est désigné entrepreneur de la construction du canal. Louis XIV l’anoblit peu après.
Le 1er janvier 1667 signe le début des travaux de construction du canal du Midi. Les premiers chantiers sont lancés sur le système d’alimentation en Montagne Noire.
Ces ouvrages sont ma plus forte passion et sont mes plus chers enfants, dans lesquels j’espère de revivre bien plus longuement que dans ceux qu’il a plu à Dieu de me donner de mon mariage
Pierre-Paul Riquet
A propos du canal du Midi
En mai 1668, Pierre-Paul Riquet achète aux enchères le fief et les péages du canal. Il devient dès lors le “Seigneur du canal du Languedoc”. Ce titre lui permet de percevoir à son compte les taxes sur les marchandises et les personnes transportées sur le canal du Midi.
En juin 1669 Pierre-Paul Riquet devient adjudicataire des travaux du canal, de Trèbes à l’étang de Thau, ainsi que de la construction du port de Sète, pour la somme de 5,832 millions de livres. Les chantiers s’accélèrent.
Mais le chantier du canal du Midi est coûteux et le « Seigneur du canal du Languedoc » est écrasé par les dettes tant et si bien qu’à sa mort, ses héritiers se voient obligés de revendre la moitié de leurs parts du canal du Midi.
La construction du canal du Midi mobilise de très nombreux ouvriers. On compte jusqu’à 12000 ouvriers à la tâche. Le chantier est long mais surtout pénible. N’oubliez pas qu’à cette époque, les tâches, aussi techniques et colossales soient-elles, sont toutes réalisées à la main !
Pierre-Paul Riquet doit redoubler d’inventivité pour maintenir ses différents employés à leur poste. Outre la mensualisation des salaires, Riquet met en place un système de protection des travailleurs : s’ils sont malades ou si les conditions météo ne permettent pas de travailler, Riquet paie tout de même ses ouvriers. Du jamais vu pour l’époque !
Après 14 ans de travaux, le chantier du canal touche à sa fin. Décédé quelques mois auparavant, le 1er octobre 1680, Pierre-Paul Riquet ne verra jamais la mise en eau du canal du Midi ! Il est inhumé dans la cathédrale Saint-Etienne à Toulouse.
Le 15 mai 1681, un convoi de 25 barques part de Toulouse pour un voyage inaugural. Au passage de Béziers, ville natale de Riquet, une grande fête est organisée en son honneur !
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