L’ouvrage du Libron construit de 1855 à 1857 constitue une vraie prouesse technique !
Cet ouvrage permet, lors d’épisodes de crues, le passage des eaux du Libron au-dessus du canal. Il est aujourd’hui encore manœuvré par les agents de VNF dans des conditions quasiment inchangées depuis le XIXème siècle. Cet ouvrage est protégé au titre des Monuments Historiques depuis 1996.
Le Libron est un fleuve côtier qui prend sa source à Laurens dans le département de l’Hérault pour se jeter dans la Méditerranée au niveau de la commune de Vias, juste après avoir croisé le canal du Midi.
Ce croisement n’est pas vraiment problématique pendant la première moitié du XVIIIe siècle car le cours du fleuve coupe le canal en plusieurs endroits. Mais l’augmentation de la population de la communauté de Vias pousse à l’endiguement du Libron pour permettre la mise en valeur d’une part plus importantes des terres disponibles.
Vers 1750, le croisement du Libron s’effectue sur un seul point et les apports de sédiments dans le canal en période de crue viennent périodiquement combler le canal.
Une étude est réalisée en 1757 pour éviter les travaux coûteux et l’interruption de navigation sur le canal suite aux crues du Libron. Plusieurs solutions sont avancées, l’une d’elle est retenue en 1764 et mise en place 1767. L’idée est d’organiser le croisement sur un espace restreint.
Comme les eaux du fleuve ne peuvent pas passer par un aqueduc par manque de pente, elles franchiront le canal au-dessus ! Comment ?
Grâce à un ponton qui occupe toute la largeur du canal. Le ponton est remisé à proximité de l’ouvrage et mis en place dès que des orages s’annoncent. Les eaux du Libron en crue déferlent alors au-dessus comme dans une gouttière. Les sables et graviers glissent sur le ponton et passent au-dessus de la cuvette du canal sans pouvoir s’y déposer. Il démontre rapidement son efficacité.
Progressivement amélioré, il est utilisé pendant presque un siècle. Son seul défaut : lors des crues, la position du ponton empêche tout passage aux bateaux et la navigation est arrêtée.
Pour solutionner ce problème le directeur de la division d’Agde, l’ingénieur Loysel, imagine en 1826 un dispositif pour faire passer les eaux de crue sur deux points dissociés ouverts en alternance. Cette idée n’obtient pas l’agrément du directeur général et reste à l’état de projet...
Au moment où la Compagnie du canal du Midi lance de gros programmes d’investissement comme le pont-canal sur l’Orb à Béziers, pour mettre la voie d’eau en état d’affronter la concurrence annoncée de la voie ferrée, la question du Libron réapparait.
En 1853, Urbain Maguès, alors Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées et directeur général du canal, reprend à son compte l’idée de Loysel. Il conçoit le système des aqueducs mobiles qui doivent reconstituer alternativement le lit du Libron.
Son plan est approuvé en 1854. Le décret de déclaration d’utilité publique est promulgué par Napoléon III le 10 février 1855 (Décret Impérial pour l’amélioration de la navigation au passage de la rivière d’Orb à Béziers, du torrent du Libron, et de la rivière d’Hérault à Agde).
Les travaux commencent immédiatement et le nouveau système est livré à la navigation en 1857.
L’ouvrage sépare le lit du Libron en deux bras. A l’approche d’un bateau, on oriente les flots du fleuve vers un aqueduc mobile déployé au-dessus du canal du côté le plus éloigné du point d’arrivée du bateau.
Celui-ci peut alors s’engager dans une passe aménagée pour gagner un bassin d’attente situé au centre. Un autre aqueduc mobile est alors placé au-dessus du canal en arrière du bateau.
On y oriente ensuite les flots du Libron. Reste alors à replier l’aqueduc mobile qui se trouve en avant du bateau pour libérer le passage et lui permettre de repartir.
Ce dispositif a un double avantage, il permet à la navigation de ne pas s’arrêter et évite les dépôts dans le canal et les problèmes de curages qui en découlent.
Le système des ouvrages du Libron est présenté à l’exposition universelle de Londres en 1862, au pavillon des Travaux public de France. Un prix est décerné à Urbain Maguès et Achille Simonneau, les instigateurs du projet.
Cet ouvrage est encore utilisé de nos jours par les agents VNF en charge de la gestion du canal, dans les conditions d’exploitation proches de celles d’origine.
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